Rétro à tous les amis ! Aujourd’hui, il est temps pour le NBK de se pencher sur BoJack Horseman, la série qui se termine brillamment par une saison 6 réussie. Néophytes ou confirmés, plongeons-nous tous ensemble dans cette divine comédie !

Bojack Daniel’s

 

“La fin est bonne en toute chose”, tel est le leitmotiv dictée dans Ghost Dog. D’ailleurs, ces mots du métrage s’appuient sur l’Hagakure, indispensable pour trouver la voie du samouraï. 

En ce sens, vous pourriez nous demander quel est le rapport entre la série Netflix BoJack Horseman et ce vieil adage ? Hormis une saison 6 qui clôture une aventure débutée en 2014, rien. Pourtant, il est important de se poser la question de la finition : à quel moment une œuvre doit-elle s’arrêter ? Car si nous souhaitons toujours en posséder plus, nous savons également que rien n’est éternel.

Somme toute, terminer en 2020 sur une note douce-amère est probablement salvateur quand bien même le paradoxal goût de trop-peu couplé à un vide intérieur nous hante. Parce qu’il aura fallu du temps pour en parler, digérer et saisir réellement ce que la création avait à nous exposer et à nous faire ressentir.

Les adultes que nous pensions être en frissonnent encore ! Ainsi, nous sommes face à une surprise sortie de nulle part qui a su redéfinir les contours de l’animation. Celle qui sévit encore et toujours, excluant les relations infantilisantes. Toutefois, le cabotinage est vite arrivé et une écriture talentueuse couplée à une réalisation sans faille sont capitales pour s’extirper du piège.

Mais avant toute chose, il s’agit de faire les présentations…

Horse in the hood

 

La diégèse BoJack, c’est l’histoire d’une star déchue issue d’une sitcom des années 90, lorsque cela était une mode inconditionnelle. Ainsi, Galipettes en famille (Horsin’ Around en VO), c’est la ringardise attendrissante qui relie notre personnage central avant d’entrer dans la débauche, les déboires et la dépression. 

De surcroît, vous l’aurez constaté dans les images. C’est ainsi que notre anti héros est un cheval dans un monde où les animaux cohabitent avec les humains. C’est en cela qu’ils travaillent ensemble, s’accouplent, s’engueulent. Et parcourent leur vie souvent décrite comme misérable.

Quant à ce procédé, assez timide lors de la première saison, il sert de base pour des gags savoureux et récurrents. Dorénavant, la formule n’a cessé de s’améliorer avec comme rampe de lancement idoine un 3ème cycle absolument génial.

A vrai dire, il faut avouer que les débuts sont un peu mitigés voire même chaotiques. Impossible de comprendre les enjeux sans s’accrocher, le temps de la mise en place des personnages. Car notre BoJack est le comble du connard auquel on s’attache peu à peu. Surtout lorsque nous réalisons à quel point il est l’image du trauma. Notamment celui de l’enfance dont il est difficile de guérir mais aussi des mauvais choix.

BoJack l’éventreur…

 

La série Bojack Horseman ne se contente d’être le reflet du malaise d’un homme ou de la société en général. Ce serait si réducteur ! Sur ce point, cela constitue le fil rouge relatif à des aventures différentes au fur et à mesure des épisodes. Par ailleurs, cela n’empêche pas le show de nous exposer un humour ravageur, tantôt potache tantôt sarcastique.

Par conséquent, la névrose ronge nos personnages même si cela n’est pas ce qui saute aux yeux de prime abord. A cet égard, chaque indice compte, comme le fait que Princess Carolyn soit incapable de discerner la véritable nature de Vincent Adultman qui serait (sans confirmation explicite)… 3 enfants empilés camouflés sous un imperméable !

Une figure burlesque qui fait office de métaphore, chacun voyant ce qu’il veut voir. La situation est identique pour Todd, attachant crétin fainéant, dont les apparitions prennent une ampleur telle que son rôle de faire-valoir mute.

A vrai dire, il devient un élément central ou tout du moins capital.   C’est pourquoi la création de Raphael Bob-Waksberg fait office de satire, de comédie, de mélodrame et d’absurde. Un ton clairement mature qui place Bojack Horseman en fer de lance de l’animation tant la maîtrise est palpable !

Crazy horse

 

Non seulement la série se démarque par le subversif mais le plus beau, c’est qu’elle remplit parfaitement sa mission. Bien loin d’un lissage artistique confus, Bojack Horseman ne s’aventure pas dans les méandres de la contestation facile. Ainsi, le traitement du sujet #MeToo se fait tout en finesse, bien loin des maladresses médiatiques et/ou des réseaux sociaux.

Si dans la globalité, la dénonciation de la réification de la femme est omniprésente tout au long de la saison 5, l’horreur est aussi appliqué envers la gent masculine. Quant à la conscience des victimes sur les actions infligées à leur encontre, l’angle est tout à fait différent. Une analyse qui se fonde sur le diptyque Ethos/Pathos, chose suffisamment rare pour être soulignée.

Quoi qu’il en soit, les créateurs nous confrontent à un sens inouï de la nuance. Par conséquent, Diane, celle qui tente de remettre BoJack dans le droit chemin, connaît son lot de contradictions et de souffrances. De plus, l’évolution de chaque acteur de ce théâtre de la vie possède doutes et faces sombres au milieu de toutes ces farces en surnombre.

N’oublions pas cependant l’humour désolipant récurrent. De surcroît, les variations sont nombreuses allant de la bonne grosse blague un peu tarte à l’argutie impressionnante. Visuels, sonores, suggestifs ou explosant à la tronche du spectateur… tout y est ! Finalement, le parallèle est rapidement établi entre l’évolution de la série et celle de ses comparses.

L’art de l’âme-horse

 

Du reste, ce sont les trouvailles de BoJack Horseman qui nous transcendent encore et toujours. Ainsi, la saga n’a fait que confirmer sa montée en puissance au fil des saisons avec une noirceur inégalée voire carrément cradingue. Une vision où l’espérance conserve sa place au milieu de tous ces troubles. Au fond, les abîmes ne sont jamais loin mais le thème principal demeure la possibilité de devenir une meilleure personne. Enfin si la chance aide un peu.

Pour ces raisons, BoJack Horseman explore les tréfonds de l’âme, à l’instar des “confrères” Big Mouth ou encore Tuca et Bertie. Toutefois, la réalisation et l’écriture apportent ce petit plus qui place la production légèrement en avance. Tout bien pesé, il s’agit éventuellement d’une métamorphose perpétuelle et bénéfique qui apporte quintessence et portée narrative.

Par conséquent, tout ce beau monde a le droit à son « moment de gloire” qui apporte une nouvelle dimension pour chacun d’entre eux. A l’image de Mr. Peanutbutter, simple ressort comique qui s’étoffe de plus en plus jusqu’à le mettre face à ses propres contradictions. Du reste, même si les personnalités ne sont pas jamais trahies dans leur essence, elles se dévoilent peu à peu.

Mais à bien considérer les choses, il est indéniable que les addictions touchent tous les individus sans exception. Si BoJack est esclave de la drogue et de l’alcool, amenant d’autres joyeux drilles dans sa chute, les sentiments et le traumatisme sont aussi de terribles antagonistes. Tandis que nous nous mettons parfois à douter des bonnes intentions apparentes, expliquées bien des années plus tard. Sans parler de ces cliffhangers réguliers qui nous plongent parfois dans l’effroi…

BoJack-o’-lantern

 

Dans un autre ordre d’idées : comment ne pas vous exposer la fusion entre visuel, scénario et OST ? A cet égard, les trouvailles du créateur Raphael Bob-Waksberg liées au talent d’illustratrice de Lisa Hanawalt frétillent à tout instant, portées par des musiques très hétérogènes. Ainsi, le compositeur attitré de la série, Jesse Novak, nous livre des performances de haut vol. Par ailleurs, de nombreux titres sont piochés çà et là. Et quelle diversité paradoxale !

En effet, nous passons de l’électro au jazz, en passant par le hip-hop ou du bon vieux rock. Une folle liste exhaustive ! En fin de compte, la partition suffit à nous narrer l’histoire de BoJack. Mais attention à ne pas déformer nos propos : les dessins sont somptueux. De plus, ceux-ci disposent d’une amélioration continue en nous proposant un nombre d’environnements ahurissants !

Non seulement, comme nous vous le disions précédemment, les réalisations sont incroyables mais il est aussi essentiel d’observer. Dans la série BoJack Horseman, tout ne se déroule pas au premier plan. Beaucoup de détails prennent la forme de l’essentiel en dépit d’un gag éphémère. D’autant plus qu’une situation banale peut s’expliquer bien des épisodes plus tard.

Toutefois, il est évident que la perfection n’est pas de ce monde et quelques ellipses ou facilités d’écriture jalonnent parfois le récit. Avec plus ou moins de conséquences. Mais toute réflexion faite, ce serait faire un faux-procès à un objet qui ne le mérite pas. Mis à part, peut-être, cette seconde partie de la saison 6 qui semble accélérer pour boucler les axes narratifs.

Et encore…

Bon chic BoJack

 

Pour cette raison, la série envoie au tapis bon nombre de ses contemporains. Et comment ne pas évoquer les épisodes-concept ? Celui où tous les animaux changent, BoJack devenant Bobo le zèbre, ou encore le chapitre entièrement silencieux. En bref : une dinguerie qui trouve son point culminant avec l’enterrement.

20 minutes de monologue totalement déconstruit où s’enchaînent flash-backs et présent sans que la cohérence ne soit la principale attraction. Un plan fixe où notre salaud de cheval adoré nous conte l’histoire de la personne à sa manière. Non seulement le fond est tout bonnement extraordinaire mais le rythme est particulièrement soutenu. Malgré une réalisation pour le coup minimaliste !

Une véritable performance à mettre sur le compte du doublage de Will Arnett qui incarne BoJack à la perfection. Cependant, la VF n’est pas en reste à l’image de Benoît Grimmiaux, qui incarne le rôle principal, tout comme le reste du casting particulièrement inspiré. Des interprétations magistrales pour une traduction juste, exercice ô combien difficile.

Et la saison 6 dans tout ça ? L’ultime. La décision de la plateforme et non celle du concepteur. Pour toutes ces raisons, ce dernier a eu le temps de proposer la conclusion souhaitée au travers de 16 épisodes en lieu et place des 12 habituels. Un bouquet final qui sera légèrement entaché de quelques ellipses malvenues mais sans gravité extrême. Un dernier coup de dague dans le cœur, laissant libre cours à l’interprétation.

« C’était bien le temps que ça a duré”.